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PLACE DE LA MEGA LIPOASPIRATION APRES GASTROPLASTIE

Patrick Knipper

 

Introduction

Mythe ou réalité ? La « méga » lipoaspiration isolée peut-être un mythe mais son efficacité parait réelle quand elle est associée à une remise en tension concomitante de la peau. Isolée et mal indiquée, une trop grande lipoaspiration peut entrainer un mauvais résultat cosmétique. Inclus dans un programme adapté, une « méga » lipoaspiration peut devenir un atout important du traitement des séquelles post-bariatriques. Pour mieux évoquer la problématique de cette grosse lipoaspiration, nous allons distinguer deux situations fréquemment observées aujourd’hui : la demande d’une importante lipoaspiration isolée dans le cadre d’une surcharge pondérale et le traitement des séquelles d’un amaigrissement important pouvant inclure une demande de « méga » lipoaspiration.

 

Petite historique sympathique de la lipoaspiration

La première tentative pour traiter une surcharge graisseuse localisée a eu lieu en 1929 par un français DUJARDIN qui employait une curette pour gratter la graisse par voie sous cutanée.

En 1977, deux italiens, FISCHER père et fils, firent considérablement avancer la technique en broyant par voie sous-cutanée, dans un premier temps, la graisse puis en aspirant le broyât dans un deuxième temps. Très rapidement, ils introduisirent des canules avec lames internes pour broyer et aspirer la graisse dans le même temps opératoire.

Le principe de la lipoaspiration, tel que nous le connaissons, aujourd’hui revient au docteur Yves-Gérard ILLOUZ en 1977.C’est le premier à avoir utilisé des canules, branchées sur une pompe aspirante, avec création de tunnels.

En 1986, un français, FOURNIER, introduit trois notions importantes qui permettent d’affiner cette technique : l’anesthésie par l’injection de sérum froid, le travail avec une technique de maillage où l’aspiration se fait en plans croisés à partir de 2 ou 3 petites ouvertures cutanées et l’utilisation de petites canules qui augmente encore la régularité du travail.

Ensuite, les techniques et les auteurs se sont succédés apportant chacun sa petite note personnelle pour améliorer les résultats esthétiques ou pour faciliter le geste technique. Parmi les différents challenges, la quantité de graisse à enlever était devenu pour certains une priorité. On est passé de deux à trois litres à six, huit voire dix litres de graisse aspirée. Evidemment, les complications sont également apparues avec notamment des embolies graisseuses. Mais, surtout, c’est la dégradation des résultats esthétiques qui a tempéré l’enthousiasme de certains praticiens. En effet, croire que la peau peut se rétracter indéfiniment est un mythe. Je me souviens, quand j’étais interne dans le service de chirurgie plastique de l’hôpital Boucicaut à Paris, on racontait encore la phrase du feu docteur Raymond Vilain qui disait que « la lipoaspiration allait transformer des culottes de cheval en culottes de golf ». Inutile de vous dire, et avec le recul,  qu’il avait quand même sous-estimé un peu les pouvoir de rétraction de la peau mais son avant-gardisme acéré nous prévenait déjà des limites des lipoaspirations trop importantes.

Il convient, pour finir, de citer la lipoaspiration tumescente, très pratiquée aujourd’hui notamment outre-Rhin. Cette technique consiste à infuser une quantité importante de solution saline, d’adrénaline, et d’anesthésiant local dans la région désignée. L’adrénaline contracte les vaisseaux sanguins et empêche toute perte importante de sang. Quel que soit le type d’appareils et de canules utilisé, on parlera de technique tumescente dès lors qu’on gonflera le tissu avec un liquide avant de pratiquer l’opération. Plus il y aura de graisse à aspirer, plus il faudra utiliser de liquide. Il peut en être administré jusqu’à six litres en fonction de la taille et du poids du patient.
D’après la Société américaine de chirurgie plastique, la technique tumescente est plus sûre, à condition de procéder et d’opérer avec circonspection. Elle permet d’enlever, d’après les auteurs, une très grande quantité de graisse.

 

 

La rétraction cutanée dans la lipoaspiration : la magie.

La lipoaspiration est une technique formidable qui permet d’enlever par des petits orifices cutanés la graisse en profondeur. Sous anesthésie, le chirurgien plasticien aspire la graisse avec des petites canules spécifiques. Ces canules sont reliées à un « aspirateur spécial » qui aspire la graisse. Cette graisse est ensuite jetée et elle ne revient plus. Ensuite, on attend que la peau se rétracte. Tout le principe de la lipoaspiration repose sur l’élasticité de la peau c’est-à-dire sur son pouvoir de rétraction une fois que la graisse est enlevée. On peut comprendre le principe de l’élasticité de la peau en évoquant la grossesse. Si une patiente présente une première grossesse à l’âge de 20 ans, il est fréquent de voir sa peau revenir à la normale au bout de quelques mois après l’accouchement. Son ventre redevient comme avant la grossesse. On dit alors que sa peau a une bonne élasticité. A l’opposé, prenons l’exemple d’une  patiente de 40 ans qui a fait le yoyo toute sa vie et qui a eu plusieurs grossesses avec une prise de poids chaque fois importante.  Cette patiente risque de  présenter, après un accouchement, une peau flasque et distendue sur l’abdomen. On dira que sa peau n’est plus élastique. C’est la même chose pour la lipoaspiration : si le patient a une bonne qualité de peau (si elle semble élastique), la peau se rétractera correctement après la lipoaspiration ; ce sera une bonne indication. A l’opposé, si le patient a une peau de mauvaise qualité avant la lipoaspiration, celle-ci donnera un résultat médiocre. Pour schématiser, la meilleure indication d’une lipoaspiration sera une culotte de cheval localisée chez une jeune fille de 18 ans ; le résultat peut être magique. La pire indication d’une lipoaspiration sera la femme de 60 ans qui a fait des amaigrissements à répétition toute sa vie, qui expose une surcharge pondérale générale et qui présente une peau flasque avant l’intervention…

 

« Méga » lipoaspiration : mythe ou réalité ?

Pour essayer de répondre à cette interrogation, nous allons opposer deux situations : la demande d’une importante lipoaspiration isolée dans le cadre d’une surcharge pondérale générale et le traitement des séquelles d’un amaigrissement important incluant une demande de « méga » lipoaspiration.

  • Le mythe de la méga lipoaspiration isolée:

Selon mon expérience, un bon résultat stable d’une « méga » lipoaspiration pour traiter une surcharge pondérale générale, et de surcroit sur une peau peu élastique, est de l’ordre du mythe. La lipoaspiration n’est pas le traitement du surpoids en général. Une lipoaspiration ne « fait » pas maigrir au sens propre du terme. Notons cependant qu’une importante lipoaspiration peut parfois servir de « starter » à une prise en charge plus générale de l’excès de poids. En effet, il est vrai de dire que la lipoaspiration n’est pas un traitement du surpoids mais il également vrai de voir souvent les patients maigrir après une importante lipoaspiration. On pourrait alors parler de « lipoaspiration-promotion » c’est-à-dire une lipoaspiration qui va promouvoir la prise en charge par le patient de son surpoids. La lipoaspiration agit comme un starter et le bénéfice obtenu devrait être entretenu par un environnement pluridisciplinaire pour maintenir la stabilité du résultat. Mais en dehors de ce contexte particulier, la prise en charge d’une surcharge pondérale ne peut pas se résumer à une importante lipoaspiration. Cette prise en charge doit rester pluridisciplinaire.

L’élasticité de la peau devrait être également considérée avant l’intervention. Généralement, les surcharges graisseuses importantes s’observent dans un contexte de « laisser-aller » général depuis de longue date. Il s’agit le plus souvent de patient ayant abandonné leur surveillance calorique aux grignotages répétés, ne faisant plus de sport depuis longtemps et alternant les régimes avec des périodes de surpoids. Il s’agit du fameux « yo-yo » tant redouté du chirurgien plasticien. Dans ce cas, une « méga »lipoaspiration ne donne pas de bon résultat. Le patient sera « amélioré » en matière de volume mais l’aspect de la peau restera dégradé. La lipoaspiration améliore le volume c’est-à-dire que le patient sera satisfait quand il mettra un vêtement serré. Il pourra observer une amélioration voire un changement de taille. Mais en sous-vêtement, le résultat risquera d’être catastrophique au niveau cutané et, cela, par manque d’élasticité de la peau. Il est rare, dans mon expérience, de voir un superbe résultat dans une telle circonstance. On peut être de temps en temps agréablement surpris par une rétraction cutanée exceptionnelle mais cela reste rarissime. Le plus souvent, une mise en tension complémentaire de la peau s’impose.

Toujours selon mon expérience, une mauvaise « qualité » de peau ne supporte pas une grande lipoaspiration. C’est un peu comme si on enlevait trop de graisse d’un coup et que la peau n’avait pas la capacité de se rétracter de façon si importante. Je préfère conseiller, dans ce cas, deux lipoaspirations à 8 mois ou 12 mois d’intervalles plutôt qu’une trop grosse lipoaspiration en un seul temps. De surcroît, les lipoaspirations ainsi proposées limiteront les suites voire les risques post-opératoires. L’idée de faire deux interventions permet également d’envisager dans un premier temps une vraie lipoaspiration et dans un deuxième temps une seconde lipoaspiration associée au geste de « redrapage » cutané. Ce geste de lifting de la peau aurait été difficilement associé à une « méga » lipoaspiration. On voit donc immédiatement les avantages de faire deux lipoaspirations moyennes par rapport à une importante lipoaspiration unique :

  • Interventions moins longues avec de meilleures suites,
  • Moins de risques post-opératoires,
  • Pouvoir de rétraction de la peau plus facile,
  • Possibilité d’associer un lifting de la peau lors du deuxième temps…

L’inconvénient premier reste la nécessité de faire deux temps opératoires.

Au total, hormis certains cas cliniques particuliers, je ne vois pas comment on peut obtenir une  superbe rétraction cutanée avec une lipoaspiration de six voire huit litres sans risque (parfois vital) pour le patient et avec une peau dont les capacités de rétraction restent limitées.

  • La réalité de la « méga » lipoaspiration dans le cadre du traitement des séquelles bariatriques.

Dans ce contexte, l’approche thérapeutique est différente. Nous ne sommes plus dans la logique de la lipoaspiration au sens propre du terme où tout le principe de la lipoaspiration est basé sur la seule rétraction cutanée après la perte du volume adipeux. Ici, on sait qu’au départ la capacité de rétraction de la peau est réduite. Le but d’une importante lipoaspiration ne sera pas d’obtenir une rétraction secondaire de la peau mais de compléter l’ablation de la graisse qui a résistée à l’amaigrissement après la gastroplastie. Pour schématiser, on pourrait dire que la gastroplastie agit comme une « lipoaspiration médicale » (la graisse disparaît par le régime et de l’intérieur) et que la lipoaspiration secondaire est une « lipoaspiration chirurgicale » (la graisse est aspirée de l’extérieur par une canule). Cette vraie lipoaspiration secondaire, qui peut être une « méga » lipoaspiration, va compléter le travail en enlevant la graisse résiduelle.

La « méga » lipoaspiration ne se conçoit donc qu’associée à un geste de lifting secondaire de la peau. En ce sens, elle est magique puisque seule une vraie lipoaspiration pourra agir sur cette graisse qui a « résistée » à l’important amaigrissement. La vraie question qui se pose à ce stade est de savoir si on peut associer les deux interventions dans le même temps opératoire ou s’il faut envisager deux temps séparés de quelques mois. La question reste ouverte. Dans mon expérience, je préfère les séparer pour limiter les suites et les risques postopératoires. D’autres collègues proposent de faire en même temps la lipoaspiration et le temps de lifting cutané. Chacun défendra ses arguments. Dans bien des cas, il convient d’apprécier les indications en fonction du patient et d’adapter le geste au cas par cas. Proposer deux temps opératoires peut limiter les risques postopératoires chirurgicaux mais faire deux interventions au lieu d’une peut augmenter un certain risque anesthésique, etc. Dans ce genre d’indication, le chirurgien avec sa technique chirurgicale n’est pas seul à décider; les souhaits du patient, ses motivations, sa capacité à apprécier les suites voire les risques doivent aider à choisir la solution thérapeutique la mieux adaptée.

Pour schématiser :

  •  devant un patiente présentant encore un gros excédent de graisse après une perte de poids suffisante et un gros excès de peau, je proposerai deux temps chirurgicaux car il y aura deux temps opératoires importants : une « méga »lipoaspiration première et un important temps de lifting de peau. Cependant, il faut noter qu’une région comme l’abdomen peut plus facilement supporter les deux temps opératoires en même temps (lipoaspiration de la région sus-ombilicale et lifting de la région sous-ombilicale). Personnellement, je préfère « pêcher » par excès dans la sécurité pour les prises en charge des séquelles bariatriques. C’est un choix mais je comprends tout à fait l’option contraire.

 

  • Devant un patient présentant de la graisse résiduelle après une gastroplastie mais de façon relativement localisée et séparée de la future zone de lifting cutané, je proposerai un seul temps opératoire. Le fait d’avoir deux zones opératoires séparées géographiquement (lipoaspiration de la culotte de cheval + lifting de la face interne de la cuisse ou lipoaspiration des régions latérales de l’abdomen + lifting de la partie inférieure de l’abdomen) limitera les risques en cas de complications. Il est aisé de comprendre qu’une petite infection post-opératoire pourra rester limitée à la cicatrice si la plastie abdominale est isolée. Généralement, les soins locaux suffisent. A l’opposé, si une infection de la cicatrice est en contact avec une importante zone de lipoaspiration adjacente (où il a été créé plusieurs dizaines de tunnels avec hématomes, fragilité vasculaire, etc), le risque de diffusion bactérienne est réel. Mais comme dans la proposition précédente, cela reste du domaine de l’analyse au cas par cas.

Au total, la « méga » lipoaspiration dans le traitement des séquelles bariatriques est une réalité et peut être formidable si elle reste associée à un temps secondaire de remise en tension de la peau. Seule, cette importante lipoaspiration complémentaire pourra faire disparaître une graisse résiduelle qui avait résistée à l’amaigrissement post-bariatrique.

Conclusion

La « méga » lipoaspiration est le plus souvent un mythe quand elle est mal indiquée ou proposée isolement dans le cadre d’une surcharge pondérale diffuse et négligée. Le mythe devient un « bide » quand le patient  associe surcharge pondérale et mauvaise élasticité cutanée.

En revanche, une grosse lipoaspiration devient très efficace quand elle est prise comme un acte complémentaire après un important amaigrissement et, surtout, quand elle est associée à un temps de remise en tension de la peau.

En matière de « méga » lipoaspiration, on peut vite passer du « bide » au bonheur mais c’est toujours un peu comme cela avec la magie. Et la lipoaspiration, dans mon expérience, reste un acte magique.

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